1831 Réception en l'honneur du Seigneur Finran

Le Seigneur Finran se composa un visage et après un dernier coup d’œil à sa sœur, entra. Fendant la foule il se dirigea vers son Père, le Bailli. Il ne jeta pas un seul regard aux nobles rassemblés ici, certainement pas avant d'avoir parlé à Père.
Une fois devant le maître des lieux, il s'inclina :
" Veuillez, très cher père, excusez mon absence de tantôt, mais je me devait d'aller porter mes respect à ma puinée. Sœur que j'ai eu le plaisir de découvrir plus radieuse que jamais. Votre famille grandit et prospère, père, et c'est une bonne chose."
Il risqua un petit regard en coin à Nelia. Il aurait aimé lui faire un petit clin d'oeil de connivence, mais il ne pouvait se le permettre... Il espérait qu'au fond d'elle, elle riait autant que lui.

Nelia suivit son frère dans la foule d'un pas sûr et hautain. Une démarche fière et factice qui lui donnait des airs de femme.
Après que son frère ne se soit incliné devant ce qui n'était gère plus pour eux qu'un géniteur, elle ponctua des compliments de son frère par une courbette de circonstance.
Il y avait quelque chose d'amusant dans cette triste pantomime. Peut-être de savoir ce Père désarmé face à l'ironie du Fils. Elle ne cilla pas à cette pensée.
La discussion de son frère reprenant, elle laissa un instant son regard effleurer l'assistance...

Une fois son père salué, Finran détailla les nobles de l'assistance et il prit enfin conscience de sa présence.
Ici on le connaissait sous le nom de Lakeran de Lusen, noble célibataire quelque peu misanthrope, mais riche et influent.
Finran se demandait toujours comment il arrivait à maintenir cette identité alibi sans proférer un seul mensonge. Il devait bien admettre que son talent forçait l'admiration.
Il détourna bien vite son regard faisant mine de s'intéresser aux diverse jeunes filles qui lui lançaient des œillades insistantes. Celles-ci avaient reçu des instructions... et malheureusement elles semblaient bien trop au courant que la jeune fille actuellement à son bras n'était que sa soeur. Finran retint un soupir et maintint le masque.
Il entraina sa soeur un peu à l'écart.
"Regardez-les toutes à minauder..."
Son ton était désobligeant mais cela seule Nelia pouvait l'entendre ; sur son visage il gardait un sourire étincelant.
"Je vousparie qu'elles m'ont à peine regardé. Je pourrais être plus laid qu'un étron de poules qu'elles me donneraient quand même du 'Beau seigneur' à toutes les sauces..."
Il se pencha encore plus vers sa soeur.
"Mais si vous savez bien regarder Nelia vous verrez dans leurs yeux le mensonge. Leur attitude un brin trop raide, forcée. Oh oui elles sont douées et beaucoup n'y voient que du feu, mais moi on ne me berne pas si facilement. Apprenez à observer Nelia... Regardez sous le masque ! "
Il parcouru encore la foule du regard, cherchant un exemple flagrant à montrer à sa soeur, mais son regard tomba à nouveau sur le seigneur de Lusen ; c'était une invite. Il devrait tôt ou tard aller lui présenter ses respects.
Ignorant encore une fois l'homme il désigna discrètement une jeune fille brune maquillée à outrance.
"Regardez-la, elle doit être bien jeune pour être si peu sûre d'elle et si maladroite... Elle aimerait me faire penser que je lui plait mais au fond je ne doit vraiment pas être son genre. Observez ses gestes, ils sont élégants évidemment, mais ils ne sont pas tout à fait finis, vous voyez ce que je veux dire ? C'est ce qui lui donne cette air maladroit, elle ne va pas jusqu'au bout des émotions qu'elle aimerait faire croire. C'est un travail inachevé et peu crédible."

"Je crois que je vois ce que tu veux dire..." chuchota Nelia. Ses lèvres bougeant à peine, personne n'était assez près pour voir, lire ce qu'elle disait. "Ses gestes sont des esquisses. Presques saccadés." Avec un petit sourire dans la voix, elle ajouta. "J'ose espérer feindre mieux que ça!"
Ses petits pas s'accordaient au pas de son frère. Elle aussi était la cible de certains regards, sans le savoir le moins au monde. Observatrice, mais pas encore experte...

Le seigneur Finran eut un sourire éclatant pas tout à fait feint.
"Bien sûr que vous faites mieux que cela ! Père n'y a vu que du feu tout à l'heure."
Finran était conscient des regards qui s'attardait sur sa sœur, mais il n'en dit rien, ne montra rien ; il ne voulais pas encore briser l'innocence de la seule qu'il croyait pure. D'une certaine manière il en était fier.
Puis, prenant enfin une décision, il ajouta.
"Venez avec moi je vous en prie. Il y a quelqu'un que je me doit de saluer et je ne peux plus différer notre rencontre."
sans attendre de réponse de sa sœur, il se dirigea vers ce noble étrange qui portait un masque de liège sur la moitié du visage.
Il raffermit sa prise sur le bras de sa sœur, pour la rassurer ou pour se rassurer lui-même ; il ne savait pas trop. Tout en marchant il lui décrit l'individu.
"Regardez et méfiez-vous, dit-il entre ses lèvres pincées.
Il se fait appeler Lakeran de Lusen, même si je ne sais comment cela reste possible. Jamais il ne mentira, à personne, pas même à son pire ennemi, mais prend bien garde à ses paroles ... Si vous vous laissez entrainer il pourrait vous faire croire que le ciel est vert sans proférer un seul mensonge !"
Le Seigneur Finran eut un rire étrange.
"Ah ! je ne sais si je dois le haïr ou l'admirer !"

Nelia suivit son frère. Prudente, mais pas vraiment consciente du vrai enjeu de la rencontre. Les paroles de son frères étaient... Effrayantes? Amusantes? Admirables? Exagérées?
Elle ne savait pas. Sa réflexion s'imprimait discrètement sur son visage par un léger froncement de sourcils. Elle avait aperçu l'individu. Elle s'était déconcentrée de son rôle. Juste au mauvais moment.
Il était grandiose. Beau.
Ils s’arrêtèrent à sa hauteur. Elle était mal-à-l'aise. Ses yeux. Si froids. Elle serra un peu plus fort le bras de son frère. Elle sentait sa poigne ferme. Comme pour la rassurer. Cet homme ne serait pas un danger pour elle : son frère était là. Son choc, son émoi ne serait pas un danger pour elle : son frère était là. Concentres-toi sur Finrann!!!
Cet homme est malsain, admirable...
Figée, elle était figée dans cette émotion inconnue. Il n'était même pas envisageable... Mortifiée...

Maître Linaor vit le jeune couple s'approcher de lui et, à leur insu, il entendit leur échange.
De manière à mettre fin à leur petit conciliabule, il se rapprocha de lui-même un grand sourire aux lèvres.
" Seigneur Finran ! enfin vous apparaissez, toute la noblesse se demandait déjà si vous n'aviez pas à nouveau disparu."
Il sourit élégamment et se tourna vers Nelia.
"Dame Nelia, je vous prie d'excuser mes manières."
Il s'inclina joliment devant la dame.
"Vous devez être ravie de retrouver votre frère. Voila la famille à nouveau réunie..."

Voila la famille à nouveau réunie déjà une phrase qui pouvait s’interpréter de deux façons différentes...
Le Seigneur Finran hésita un instant à répondre sur un ton désinvolte et ironique à la manière du maître, mais un simple regard de ce dernier l'en dissuada. Il se contenta d'incliner la tête en signe de respect et souffla entre ses dents, trop bas pour que quiconque l'entende.
"Maître... Linaor."
Il jeta un rapide regard aux alentours et demanda toujours aussi bas.
"Pourquoi n'y a-t-il personne qui soit là... hm, officiellement."
Un simple signe de tête et un léger geste de la part du maître convainquirent Finran de ne pas insister sur le sujet, du moins pas en publique. Ce dernier reprit alors un ton plus enthousiaste.
"Je vois que vous connaissez déjà le nom de ma très chère soeur, seigneur ! Et moi que me faisait un plaisir de vous présentez."
Il se tourna vers Nelia.
"Voici celui que l'on nomme Seigneur Lakeran de Lusen."

Nelia, à son tour, se fondit dans une gracieuse révérence à l'adresse de l'homme. Elle parla d'une voix qu'elle voulait détachée, mais polie, mais qui sonna à son oreille, un peu trop empreinte d'émotion. Angoisse de plaire?
"Enchantée de vous rencontrer, Seigneur. Mon frère m'a, depuis son retour, déjà loué vos talents..."
La politesse exquise et vide, qu'elle trouvait étonnement sensée, aujourd'hui.
Maladroite adolescente...

Le visage de Maître Linaor ne laissa rien paraître de son amusement. Ainsi, il ne s'était pas trompé, le lien entre ces deux -là était fort, plus peut-être que ce qu'il avait prévu. Les voila qu'il partageaient déjà leurs secrets a peine s'étaient-ils retrouver. Le maître jaugea la jeune fille du regard. Elle ne serait pas un obstacle insurmontable, mais un obstacle tout de même. Il ne fallait absolument pas qu'il sous-estime ce lien qui l'attachait à son frère, visible à la manière dont elle s'accrochait à son bras. Si ce n'est cette poigne un peu trop désespérée, la jeune noble tentait de ne rien laisser paraître. Elle était douée, il devait l'admettre, suffisamment pour berner la plus grande partie des invités présents.
Maître Linaor prit nonchalamment un verre de vin proposé par un des nombreux serviteurs qui quadrillait la pièce sans lâcher du regard la jeune Nelia.
Peut-être pourrait-il user de se lien fraternel à son avantage après tout, oui, cela valait la peine d'essayer quoiqu'aie put lui dire son frère.
Il sourit de la manière la plus chaleureuse qui soit et s'adresse directement à la jeune dame.
"Ma dame, je sens que toute cette foule vous gêne. Le seigneur Finran et moi-même seront ravi de vous escorter jusqu'à la terrasse. Nous pourrons ainsi parler sans avoir besoins d'élever la voix."
Il jeta un bref coup d'oeil son ancien élève qui opina imperceptiblement.

Finran comprit. Il fallait qu'il les emmène dans un endroit où personne ne pourrait entendre leur conversation. La suggestion de son maître était bonne, la terrasse lui semblait un endroit approprié. Ce qui semblait plu étonnant était le fait que maître Linaor incluait Nelia dans la conversation à venir, pas que cela gêne Finran, au contraire, mais il s'était attendu à devoir argumenter pour que sa sœur puisse participer à l'échange, mais une fois de plus son maître l'avait devancer. Il se tourna vers Nelia.
"Ma sœur, qu'en dites vous ?"
Il lui laissait ainsi le dernier mot. Il ne l'obligerait pas à faire ce qu'elle ne voulait pas et si c'était son désir de rester dans cette foule qu'il en soit ainsi. Il essaya d'ignorer le regard désapprobateur de Linaor et de maintenir son sourire.

Nelia fut surprise que l'homme l'inclue dans sa conversation avec son frère. C'était si rare qu'elle se sente prise qu sérieux. Autre que la potiche, fille de baron à que l'on a nourrie de "soit belle et tais-toi". Et son sourire, sa politesse...
Si tu te laisse entrainer il pourrait te faire croire que le ciel est vert sans proférer un seul mensonge... Mais peut-être voulait-elle voir le ciel en vert...?

au mots de son frère, elle lui rendit un sourire exquis. "Volontiers, mon cher frère. Un peu d'air nous fera le plus grand bien."

Arrivée sur la terrasse loin des yeux inquisiteurs et des oreilles indiscrètes, il s'assit sur un des bancs présents de manière décontractée. Toujours en regardant ostensiblement Nelia du coin de l'oeil.
"Alors, comment se sont déroulée les retrouvailles."
Il ignorait Finran à dessein, cherchant à en savoir un peu plus sur ce que ce dernier avait confié à sa soeur.

Nelia tira sur le bras de Finran pour le forcer à s'assoire à ses côtés. Elle était troublée par le regard, presque amusé, lui semblait-il, de Linaor. Et cette question qui lui semblait purement badine.
"Aussi bien que faire se peut, étant donné le nombre d'années sur lesquelles s'étend son absence..."

Finran se reprochait d'avoir parlé, pourquoi s'était-il donc laissé aller ainsi ? Linaor l'avait bien compris, il avait trop parler et à présent il voulait savoir ce qu'il avait révélé. Il faisait preuve de délicatesse en ne lui posant pas la question directement, il attendrait patiemment la réaction de sa soeur pour voir ce qu'il pourrait en déduire, mais Finran aurait presque préféré qu'il lui pose la question tout de go ; il ne voulait pas que sa soeur soit utilisée malgré elle comme source d'informations.
Il ne pouvait pas protester pourtant, le maître l'ignorait et il aurait été... impoli d'imposer sa présence. Il n'était officiellement plus un élève mais Linaor restait un maître. Il se devait de faire preuve de respect.

Le gamin restait tranquille malgré son évidente agitation intérieure, bien. Il consacra toute son attention à la jeune noble.
"Huit ans si je calcule bien, en effet les années peuvent paraître bien longue lorsque on les passe entouré de solitude. Je ne suis pas moi-même étranger à cet amer sentiment. Il est dommage que personne n'ai été là pour vous soutenir dans cette dure épreuve."
L'ironie dont il faisait preuve était à peine perceptible. Il ajouta avec un sourire énigmatique.
"Peut-être auriez-vous voulu venir étudier avec votre frère ?"
Ces yeux pétillaient de malice, mais sans mauvaises intentions.

L'homme avait accentué le mot "étudier" d'une manière qui laissait entendre qu'il savait... Qu'il savait ce que son frère avait enduré... Faisait-il partie de ces gens? Etait-il violent? Cruel? Comme ce... Maître Linaor qui avait tantôt causé les larmes de son frère? Elle ne pouvait y croire, l'imaginer. Finran lui aurait dit si ça avait été l'un d'eux? Non? Elle aurait aimé parler à son frère, mais elle n'était pas na!ive au point de croire qu'elle pouvait le laisser paraitre à l'instant.
Malgré ses questionnements déroutants et son trouble enivrant, elle répondit avec toute la sécheresse que lui inspirait ces années de non-existence. "A quoi sert une telle pique? Sérieusement, Seigneur, me l'aurait-on jamais proposé?" Elle eut un petit sourie ironique qui tranchait sur son visage doux.

Décidément il se félicitait d'avoir inclue la sœur à leur conversation. Il l'avait sentie hésiter et pourtant sa réponse était emplie d’amertume et de... regrets.
Dissimulant son hilarité intérieur il répondit le plus sérieusement du monde.
"Et bien,... pourquoi pas dites-moi."
Il la dévisagea attentivement.
"Peut-être n'avez-vous pas les mêmes habitudes ici, dans le sud, mais nous, nous savons juger de la véritable valeur de quelqu'un."
Il soupira et dit comme par devers lui.
"Vous êtes un peu âgée maintenant, dommage."
Le regret de Maître Linaor était sincère et profond. Lorsque la Bailli leurs avait demander d'apporter la meilleur éducation possible à son fils et qu'ils avaient tout d'abord refusé, car jugeant le jeune garçon trop âgé, ils auraient du demander la fillette. À l'époque elle était si discrète qu'ils ne se doutaient même pas de son existence. Une occasion ratée... il faudrait faire avec.

Nelia fut un peu déstabilisée par cette réponse qu'elle sentait sincère. Elle n'avait certes pas l'habitude d'être prise au sérieux, de quelque manière que ce fut. Il y avait quelque chose de malsain à tout ça. Comment se sentir flattée, rassurée à l'idée qu'elle aurait pu être choisie, oui, mais choisie pour être élevée de manière si dure...? peut-être qu'elle n'arrivait pas à se rendre totalement compte de l'horreur, car Finrann, son frère, était passé par là, mais était resté à ses yeux aussi pur qu'il était bien que meurtri. Peut-être qu'elle s'imaginait qu'elle aurait ainsi pu grandir avec lui...
"Mon éducation n'est plus à faire, vous trouvez?" Elle rit. D'un rire un peu jaune...
"De toute manière, ce n'était pas vous qui avez décidé cela, n'est-ce pas?" Elle le jaugeait du regard. Elle savait sa question osée, directe. Mais elle était dans le ton badin qu'elle essayait de donner à la conversation. Et puis, s'il était l'un d'entre eux, il ne saurait mentir... Non?

Après s'être - intérieurement- bien amusé, Maître Linaor décida qu'il était enfin temps de remettre à sa place cette enfant audacieuse, inconsciente de sa propre chance.
"Vous présumez de bien des choses jeunes filles."
Il la fixa du regard. Le ton soudain bien moins léger l'oeil plus dur, il demanda :
"Dites-moi pourquoi, selon vous, je n'aurais pus prendre par à cette décision ?"
Il ajouta pourtant de manière douce.
"Vous ignorez beaucoup, ne l'oubliez jamais. Connaître sa propre ignorance peut être une force... en faire étalage est une faiblesse."

Nelia sentit très bien le changement de ton. Mais c'était un risque mesuré qu'elle avait pris. Il lui semblait désormais probable qu'il soit un de ceux-ci. Et assez gradé pour oser faire le fier. Mais rien n'était moins sûr au fond. Qu'est-ce qui était une véritable information dans son discours? Elle n'était pas initiée à leurs manières encore...
"Ah, mais rien, Seigneur. Rien que l'idée que vous auriez trouvé intéressant que je sois instruite au côtés de mon frère. Cette idée m'a un peu égaré tant elle m'aurait paru plaisante..."
Ou pas... Mais cela il n'avait pas besoin de le savoir.
Nelia raffermit sa prise sur le bras de son frère, qu'elle avait nonchalamment relâché au cours de la conversation. Au delà du côté rassurant de sa présence, cela appuyait considérablement son propos.

Maître Linaor observa longuement la jeune fille en silence. Ce qu'elle venait de dire n'était qu'une demi-vérité.
Il s'était retenu à grand peine de ne pas relever ce mensonge, comme il en avait prit l'habitude, mais après réflexion il laissa tout de même échapper du bout des lèvres :

" -- Mensonge..."

Il sourit à son interlocutrice et ajouta, à nouveau sur un ton doux et badin :

"Ce n'est pas bien non plus de mentir."

Nelia répondit avec un petit sourire crispé.
"Peut-être... Mais parfois dire la vérité n'est-ce pas un acte malfaisant en soit? Et la dissimulation? Est-ce un mal nécessaire ou la petite soeur sournoise du mensonge?"
Etrangement, elle se laissait aller. Elle ne savait plus comment se rétracter. Elle ne voulait pas baisser les yeux comme une petite fille prise en faute. Elle était femme. C'était un homme malfaisant, charmant. Elle ne pouvait pas simplement se laisser piétiner. Elle devait se ménager une sortie digne, affin de se retirer bientôt dans ses appartements pour méditer. Elle savait qu'elle ne tiendrait pas la longueur.

Maître Linaor la regarda un moment avec dans le regard ce qui pourrait passer pour de la pitié.

"Vous essayez de jouer à un jeu dont vous ne connaissez pas les règles. Avez-vous lu les Fables de Corbeau, mademoiselle ?
Vous me faites penser à cette colombe qui vécut toute sa vie enfermée dans une petite cage, et qui, accablée par l'ennui se met à discuter philosophie avec le chat qui la lorgne. ' Savez-vous monseigneur chat, que le bien le plus important de tous n'est pas, comme vous le dites, de pouvoir chaque jour manger les graines les plus rares ou boire l'eau la plus pure. Non, ces graines on pour moi goût de sable et cette eau me semble fétide comme celle croupissant dans un marais. Car il me manque le plus précieux de tous les biens, la liberté seigneur chat ! Vous êtes peut-être maigre et souffrez de la soif, mais soyez heureux car vous pouvez courir partout où vos désirs vous mènent.'
Après plusieurs lunes de débats entre l'oiseau et le félin, il advint un jour que la cage dorée fut mal refermée. La colombe, ne tenant plus de joie, s'envola. Habituée à sa petite vie tranquille, ses ailes étaient frêles et son souffle fut bien vite trop court. Affaiblie, elle se posa et seigneur chat la mangea."

Maître Linaor fixa Nelia d'un œil narquois.

"Peut-être devriez-vous retourner dans votre cage avant de vous essouffler, petite colombe."

Nelia répondit par regard dur. Vexée.
"Et bien, Seigneur chat, vous ne savez pas tout de la petite Colombe."
"Peut-être a-t-elle d'autres ressources..."
Puis, lachant tranquillement le bras de son frère.
"Mais comme je suis bien dressée, je sais reconnaitre lorsque l'on me congédie..."
Sans quitter le Seigneur des yeux, elle dessina une expression exquise sur ses traits.
"La soirée se faot fraiche, je vais me retirer."
Elle fit une élégante révérence.
"Seigneur. Mon frère."
Elle retourna d'un seul geste fluide et retourna dans la salle.